Lors de la plénière de la commission extra-municipale sur les murs à pêches du 10 janvier 2009, Gilles Clément, jardinier paysagiste renommé, a proposé la contribution suivante, dont nous partageons totalement l'esprit:
Paysage
Le paysage des murs à pêches de Montreuil est donné par un ensemble : multiplication des structures destinées à la production de fruits, constituées par une architecture régulière, répétitive, d’élévation constante.
Le paysage des murs à pêches est aujourd’hui divisé en deux sous-ensembles par le passage de l’autoroute mais chacun de ses sous-ensembles conserve une échelle suffisante pour apparaître encore aujourd’hui comme un paysage identifiable et remarquable.
Le paysage des murs à pêches résulte d’une activité horticole historique. Il est entièrement fabriqué par elle et ne se justifie que par elle. La mise en péril des murs, donc du paysage identitaire le plus remarquable de Montreuil, coïncide avec l’abandon des pratiques qui justifiaient leur existence.
La question qui se pose concernant la pérennité du paysage des murs à pêches revient à poser la question de la pérennité des usages.
Usages
Les pratiques horticoles des murs à pêches correspondent à une économie historique de production et de distribution des fruits et des légumes dans la couronne parisienne. Les systèmes de production et de distribution d’aujourd’hui semblent avoir définitivement condamné les murs à pêches de Montreuil à un vaste décor sans aucun rôle décisif dans l’économie locale ou régionale.
La valeur affective du paysage que constituent ces murs à pêches ainsi que les mesures de protection qui ont rendu inconstructible une partie du territoire ont contribué à geler, pour un temps, l’ensemble résiduel de ce paysage .
La ville de Montreuil se trouve ainsi dotée d’un espace non bâti approchant les 30 hectares en cœur de ville, pourvu d’une identité paysagère unique. Le cumul identité paysagère remarquable et territoire non bâti en coeur de ville n’existe pratiquement pas en situation urbaine ou périurbaine dans les villes de France. La Petite Amazonie au cœur de Nantes, le Bois de Boulogne au cœur de Lille ou les Fortifications Vauban de Maubeuge trouvent leur origine dans un passé militaire ou dans une longue histoire de délaissé (Nantes). La production vivrière ayant créé le paysage de Montreuil ne trouve donc aucun équivalent paysager urbain.
Dans une perspective protectionniste, cette seule raison suffirait à entreprendre les démarches qui permettent de restaurer et de maintenir ce paysage. Cependant, on ne peut durablement espérer son maintien dans le temps qu’en imaginant un usage approprié à son existence.
Dominante d’usage, dominante paysagère
La surface occupée par les murs à pêches permet théoriquement de multiples usages sans que la structure des murs ne disparaisse. Il existe d’ores et déjà des interstices utilisés comme surface d’accueil à des usages sans exploitation du sol. Cependant le paysage des murs à pêches n’est pas seulement donné par les murs eux-mêmes mais par tout ce qui se trouve entre eux. En particulier les arbres et toutes les autres émergences. Dans la mesure où ces émergences viennent à occuper les interstices, elles marqueront le paysage au détriment des murs. Dans ce cas, seule une déambulation en surélévation permettrait de saisir ce paysage.
Quoiqu’il en soit la dominante paysagère du site viendra d’une dominante d’usage sauf pour des activités mineures et dissimulées à la vue. La question revient toujours aux usages.
Economie émergente
Le contexte économique planétaire fait apparaître au grand jour les dysfonctionnements d’un système uniquement basé sur un jeu financier jetant la société dans le chaos. La guerre entre les tenants d’une économie capitaliste outrancière et les partisans d’une alternative en faveur du partage, guerre engagée depuis près de cinquante ans, trouve, avec la crise actuelle, une sorte de trêve favorable à l’apparition progressive d’une nouvelle économie.
Celle-ci ne peut être abordée ouvertement par les Etats-Nations, trop engagés dans d’inextricables compromissions. L’alternative n’est donc pas à leur portée. En revanche, on peut imaginer développer localement des modèles de production et d’échanges, assortis d’un réseau de distribution de proximité en accord avec les préoccupations écologiques les plus actuelles et les plus urgentes à mettre enfin en œuvre. On peut légitimement espérer voir arriver sur le marché des aliments non dangereux pour la santé, produits dans les meilleurs conditions biologiques et cependant accessibles aux moins riches.
On comprend alors le rôle considérable que pourrait jouer l’ensemble des murs à pêches de Montreuil.
La vocation horticole du site, inscrite dans la perspective d’une économie émergente, retrouve alors une raison d’être et de se développer au service d’une société de proximité, connue, motivée et déjà engagée dans de nombreuses initiatives convergentes. A ces initiatives issues d’associations organisées, il faut ajouter d’autres initiatives isolées mais représentatives de certains groupes désireux de développer des productions potagères associées à leurs propres cultures.
La lisibilité du paysage
Le paysage des murs à pêches de Montreuil demeure secret pour la plupart des personnes extérieures à la ville. Parfois même pour certains habitants éloignés et non engagés dans les associations à l’œuvre sur le site.
La lisibilité du paysage ne constitue pas une garantie absolue de sa pérennité dans le temps mais elle y contribue. Ce qui est vu et nommé existe, le reste sombre dans l’oubli.
Le projet d’un belvédère, cité par un atelier, participe du principe du saisissement par la vue, grâce auquel un paysage demeure gravé dans la mémoire. On peut associer belvédère et cheminement surélevé dans une partie du parcours, notamment à l’occasion d’un problème de liaison entre deux quartiers mal reliés ou séparés par une trop grande longueur de murs.
Le grand problème de paysage identifiable sur le site vient du passage de l’autoroute. C’est sans aucun doute à cet endroit qu’une étude sérieuse et précise devrait être menée pour tenter d’harmoniser ce que la construction de cette voie a démantelé.
Projets de paysage justifiant des études approfondies
Paysage
Le paysage des murs à pêches de Montreuil est donné par un ensemble : multiplication des structures destinées à la production de fruits, constituées par une architecture régulière, répétitive, d’élévation constante.
Le paysage des murs à pêches est aujourd’hui divisé en deux sous-ensembles par le passage de l’autoroute mais chacun de ses sous-ensembles conserve une échelle suffisante pour apparaître encore aujourd’hui comme un paysage identifiable et remarquable.
Le paysage des murs à pêches résulte d’une activité horticole historique. Il est entièrement fabriqué par elle et ne se justifie que par elle. La mise en péril des murs, donc du paysage identitaire le plus remarquable de Montreuil, coïncide avec l’abandon des pratiques qui justifiaient leur existence.
La question qui se pose concernant la pérennité du paysage des murs à pêches revient à poser la question de la pérennité des usages.
Usages
Les pratiques horticoles des murs à pêches correspondent à une économie historique de production et de distribution des fruits et des légumes dans la couronne parisienne. Les systèmes de production et de distribution d’aujourd’hui semblent avoir définitivement condamné les murs à pêches de Montreuil à un vaste décor sans aucun rôle décisif dans l’économie locale ou régionale.
La valeur affective du paysage que constituent ces murs à pêches ainsi que les mesures de protection qui ont rendu inconstructible une partie du territoire ont contribué à geler, pour un temps, l’ensemble résiduel de ce paysage .
La ville de Montreuil se trouve ainsi dotée d’un espace non bâti approchant les 30 hectares en cœur de ville, pourvu d’une identité paysagère unique. Le cumul identité paysagère remarquable et territoire non bâti en coeur de ville n’existe pratiquement pas en situation urbaine ou périurbaine dans les villes de France. La Petite Amazonie au cœur de Nantes, le Bois de Boulogne au cœur de Lille ou les Fortifications Vauban de Maubeuge trouvent leur origine dans un passé militaire ou dans une longue histoire de délaissé (Nantes). La production vivrière ayant créé le paysage de Montreuil ne trouve donc aucun équivalent paysager urbain.
Dans une perspective protectionniste, cette seule raison suffirait à entreprendre les démarches qui permettent de restaurer et de maintenir ce paysage. Cependant, on ne peut durablement espérer son maintien dans le temps qu’en imaginant un usage approprié à son existence.
Dominante d’usage, dominante paysagère
La surface occupée par les murs à pêches permet théoriquement de multiples usages sans que la structure des murs ne disparaisse. Il existe d’ores et déjà des interstices utilisés comme surface d’accueil à des usages sans exploitation du sol. Cependant le paysage des murs à pêches n’est pas seulement donné par les murs eux-mêmes mais par tout ce qui se trouve entre eux. En particulier les arbres et toutes les autres émergences. Dans la mesure où ces émergences viennent à occuper les interstices, elles marqueront le paysage au détriment des murs. Dans ce cas, seule une déambulation en surélévation permettrait de saisir ce paysage.
Quoiqu’il en soit la dominante paysagère du site viendra d’une dominante d’usage sauf pour des activités mineures et dissimulées à la vue. La question revient toujours aux usages.
Economie émergente
Le contexte économique planétaire fait apparaître au grand jour les dysfonctionnements d’un système uniquement basé sur un jeu financier jetant la société dans le chaos. La guerre entre les tenants d’une économie capitaliste outrancière et les partisans d’une alternative en faveur du partage, guerre engagée depuis près de cinquante ans, trouve, avec la crise actuelle, une sorte de trêve favorable à l’apparition progressive d’une nouvelle économie.
Celle-ci ne peut être abordée ouvertement par les Etats-Nations, trop engagés dans d’inextricables compromissions. L’alternative n’est donc pas à leur portée. En revanche, on peut imaginer développer localement des modèles de production et d’échanges, assortis d’un réseau de distribution de proximité en accord avec les préoccupations écologiques les plus actuelles et les plus urgentes à mettre enfin en œuvre. On peut légitimement espérer voir arriver sur le marché des aliments non dangereux pour la santé, produits dans les meilleurs conditions biologiques et cependant accessibles aux moins riches.
On comprend alors le rôle considérable que pourrait jouer l’ensemble des murs à pêches de Montreuil.
La vocation horticole du site, inscrite dans la perspective d’une économie émergente, retrouve alors une raison d’être et de se développer au service d’une société de proximité, connue, motivée et déjà engagée dans de nombreuses initiatives convergentes. A ces initiatives issues d’associations organisées, il faut ajouter d’autres initiatives isolées mais représentatives de certains groupes désireux de développer des productions potagères associées à leurs propres cultures.
La lisibilité du paysage
Le paysage des murs à pêches de Montreuil demeure secret pour la plupart des personnes extérieures à la ville. Parfois même pour certains habitants éloignés et non engagés dans les associations à l’œuvre sur le site.
La lisibilité du paysage ne constitue pas une garantie absolue de sa pérennité dans le temps mais elle y contribue. Ce qui est vu et nommé existe, le reste sombre dans l’oubli.
Le projet d’un belvédère, cité par un atelier, participe du principe du saisissement par la vue, grâce auquel un paysage demeure gravé dans la mémoire. On peut associer belvédère et cheminement surélevé dans une partie du parcours, notamment à l’occasion d’un problème de liaison entre deux quartiers mal reliés ou séparés par une trop grande longueur de murs.
Le grand problème de paysage identifiable sur le site vient du passage de l’autoroute. C’est sans aucun doute à cet endroit qu’une étude sérieuse et précise devrait être menée pour tenter d’harmoniser ce que la construction de cette voie a démantelé.
Projets de paysage justifiant des études approfondies
- liaison des deux ensembles de murs à pêches séparés par l’autoroute tracé et aménagement du parcours du tramway
- paysage perçu depuis les routes périphériques et traversantes de la zone des murs
- paysage perçu depuis une éminence (belvédère, passerelle)
Cahier des charges ou charte d’occupation évolutive et paysagère des sols dans l’emprise des murs à pêches
- vocation de certains espaces à recevoir telle ou telle activité sans geler les parcelles dans une fonction définitive
- délimitation évolutive, fragmentée ou continue d’une zone dite de Tiers Paysage destinée à protégée et valorisée la diversité des délaissés.